Prix Handi-Livres 2016 : Coup de cœur du Jury

Prix Handi-Livres 2016 : Coup de cœur du Jury

L'auteur

Né à Ethe, en Gaume (Belgique), en 1977, Sylvain Laurent est passionné par la lecture et l’écriture depuis son enfance. Autre ressource à son actif, là où il va puiser de quoi nourrir sa quête d’absolu, c’est la montagne dont il est particulièrement épris. En situation de handicap mental, il a suivi un enseignement classique en Belgique et a obtenu l’équivalent d’un baccalauréat technologique. Sylvain Laurent confie écrire pour « rejoindre le souffle de Dieu ».

A noter

Les textes de Chandolinades ont été rédigés dans l’atelier d’écriture de l’écrivain suisse Anne Deriaz. Ils sont illustrés de peintures et de dessins réalisés dans l’atelier de l’artiste gaumaise Blandy Mathieu. Toutes deux ont vivement encouragé Sylvain à publier ses productions.

Les bénéfices du livre seront reversés selon le choix de l’auteur à l’Institut Jérôme Lejeune à Paris, pôle européen de la recherche et des soins pour les maladies de l’intelligence d’origine génétique.

Résumé

Chandolinades, comme Chandolin, en Val d’Anniviers, dans la haute montagne suisse, et ballades dans l’imaginaire de Sylvain, dans sa différence et son hypersensibilité à tout ce qui est au plus profond de lui, riche de ses rencontres et de ses lectures, « pèlerin de l’essentiel » en route vers son « être intime », cherchant, à travers la surabondance foisonnante des mots et des images où s’entremêlent le réel et le rêve, à percer un peu le mystère de sa propre existence.

« Au loin tous les oiseaux migraient, les arbres songeaient à leurs racines et les habitants du sapin muaient. Les herbes des champs se sont couchées. »

« Quelqu’un souffle et crie, quelqu’un écoute et entend le cri, quelqu’un de proche à notre cœur à cœur commun tire le bon pain de seigle à trois heures et demie de l’après-midi. »

Critique/Avis

Tant de registres, tant d’univers explorés dans ces pensées de Sylvain Laurent et pourtant une incroyable unité du texte. Anne Deriaz a raison d’inviter le lecteur à se délester de ses réflexes habituels pour parcourir ce livre dans lequel l’auteur se fait passeur vers un monde que l’on connaît mais observé depuis les filtres de son kaléidoscope aux couleurs chatoyantes. Comme si elle relevait de la destinée, son écriture fait défiler les paysages, nous enfonce dans des profondeurs infernales pour mieux faire rejaillir ensuite la beauté originelle d’une nature avec laquelle il communie. « Je suis dans un train qui déraille encore bien » nous dit Sylvain Laurent pour parler de son handicap qu’il semble avoir apprivoisé avec un talent peu commun, peut-être douloureusement au départ quand il écrit : « Les vipères de mes vieux souvenirs égarés de malheur merveilleux au fin fond de ma mémoire de trisomique 21 pèsent lourdement sur le vieux mur lézardé de mon petit appartement », mais avec la pleine maîtrise de son art poétique. Qu’il évoque sa foi, l’amour qui patiente au coin du feu ou l’approche de la mort, chaque mot semble murmurer que la vie des hommes n’est qu’expérience transitoire et que rien ne peut aller contre la force des éléments et le pouvoir de la création. Un regard sans concession sur l’humanité, que l’auteur définit lui-même de la façon suivante : « La pénétration d’une autre intelligence tendue extrêmement vers un autre savoir d’une autre puissance créatrice dont le regard qui sonde est dégoûtant et dont le jugement le plus correct possible est douteux. » D’un style incomparable et avec des illustrations graphiques parfaitement ajustées, ce livre auto-édité mérite le plus vif intérêt et occupe une place à part dans la littérature consacrée au handicap.

L’histoire

Chandolinades est un recueil de quarante textes le long desquels Sylvain Laurent laisse aller son imagination pour partager les images qui naissent en lui, lors de ses promenades dans les montagnes suisses qu’il connaît bien mais aussi au gré de ses voyages à l’intérieur de lui-même, à l’occasion d’introspections d’une rare intensité où se mêlent sa foi et son rapport aux hommes, à la création, à la nature qui nous entoure, etc. Un récit protéiforme qui offre un témoignage particulier et de haute volée sur le handicap mental.