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Handi-Livres 2013 : Meilleure Biographie : « Défiguré – Le poids de la différence », de Pascal Doublet
L’auteur
Pascal Doublet est né en 1966 et a grandi au sein d’une cité HLM de Colombes (92). C’est à l’occasion d’une sortie scolaire dans un zoo, à l’âge de 7 ans, qu’il est victime d’un accident qui le défigurera à vie. Le reste de son enfance ne sera qu’une lutte acharnée pour survivre, entre les hôpitaux et les centres adaptés. Devenu adulte, c’est un autre combat, bien plus difficile qui s’engage : celui de se faire accepter par une société pétrie par ses stéréotypes. Rejeté par le monde du travail, il tente à plusieurs reprises d’être son propre employeur, mais malheureusement sans succès. En dépit de son handicap, il réussit à fonder une famille de quatre enfants auprès de son épouse.
Aujourd’hui, malgré sa capacité à vivre avec ce handicap, la méchanceté et la peur qu’il inspire auxautres le gênent. Depuis quelque temps, Pascal Doublet n’ose plus à affronter le monde extérieur et se replie de plus en plus sur lui-même. Le besoin de coucher sur le papier son histoire et l’attitude des gens face à sa différence est alors apparu comme une thérapie.
A noter
Bien décidé à faire évoluer les mentalités, Pascal Doublet a également accepté de se dévoiler lors d’une émission de TV (« Toute une histoire ») devant des milliers de téléspectateurs (14 janvier 2013). L’émission de Sophie Davant avait alors pour thème « Depuis cet accident, ils sont défigurés ». L’auteur était à cette époque complètement replié sur lui-même. Deux de ses filles, Louise et Lucie, décident de répondre à l’appel à témoins de l’émission, afin de l’encourager à communiquer et à faire accepter sa différence.
Résumé
L’histoire incroyable de Pascal, qui verra son destin basculer tragiquement à l’âge de 7 ans. Gravement défiguré lors d’une sortie scolaire au zoo, s’en suivra de longues années de souffrances physiques, mais surtout morales. Aujourd’hui âgé de 45 ans, il sentait le besoin de raconter son vécu, de dénoncer l’attitude gens à son égard, mais aussi, vis-à-vis du handicap sous toutes ses formes.
C’est un récit poignant, qui ne laissera personne indifférent, et qui nous fait s’interroger sur notre comportement face à la différence
Critique/Avis
Le témoignage de Pascal Doublet sur son expérience du handicap est une invitation à réfléchir sur la différence et son acceptation. La description de son accident et ses conséquences physiques apparaissent presque secondaires en comparaison des souffrances qu’il a subies à cause du regard des autres. Comment réagir lorsqu’on vous demande de porter un masque pour ne pas effrayer les autres ?
Son propos pose ainsi les jalons d’une réflexion beaucoup plus large : si l’État et la compagnie d’assurances du Zoo sont condamnés à lui verser une somme d’argent pour réparer le préjudice moral et corporel, c’est une goutte d’eau au regard des discriminations dont il sera victime professionnellement, sans compter la douleur de catalyser un sentiment de frayeur dès qu’il met un pied dehors. On rejoint ici les débats actuels concernant le délit de faciès dans le monde du travail et qui, dans le cas de Pascal Doublet, s’invitent dans le domaine privé. En effet, nombre de réactions dont il fait l’objet s’apparentent ni plus ni moins à une forme de xénophobie (la peur ou le rejet de ce qui est différent, étranger).
L’histoire
Le 25 avril 1974, alors qu’il était âgé d’un peu plus de sept ans et qu’il visitait un zoo de Seine-et-Marne dans le cadre d’une sortie scolaire, Pascal Doublet a franchi un parapet pour s’approcher de la cage des ours et leur tendre une poignée d’herbe. Il a été littéralement happé par les plantigrades qui, alors qu’il était collé aux barreaux de la cage, l’ont défiguré. Le bilan est sans appel : amputation complète du bras gauche, le bras droit est partiellement déchiqueté, la moitié gauche du visage lacéré entraîne une défiguration majeure, la perte du globe oculaire droit et des cicatrices innombrables sur la moitié supérieure du corps.
Après plus de cent interventions de chirurgie reconstructrice, Pascal Doublet met un terme à ces opérations à l’âge de 16 ans. Il quitte cet univers médical, rencontre l'amour et construit une vie de famille. Avec Nadine, rencontrée à Garches, il passe vingt ans dans les Vosges (région natale de son épouse), trois ans en Normandie. Père de 4 enfants (dont un avec une autre femme), sa famille devient son refuge. Mais au fil du temps, le regard des autres est de plus en plus difficile à supporter. Reclus dans sa maison, Pascal n'ose plus sortir, se cache et n'assiste à aucune étape importante de la vie de ses enfants. Professionnellement, son physique l'empêche de pouvoir faire le moindre travail. S’il arrive à obtenir des rendez-vous, ces derniers se soldent tous par un échec une fois que l’employeur prend connaissance de son état. Il tente de développer différentes activités à son compte mais le regard des clients n’est pas plus conciliant que celui des responsables d’embauche et Pascal Doublet renonce à exercer une activité.
« Je n’arrive plus à gérer le regard des autres. Le simple fait d’aller faire des courses dans une grande surface m’est impossible. Je suis conscient de mon état et je lutte quotidiennement pour ne pas sombrer. Mais combien de temps vais-je encore y arriver ? Combien de temps me reste-t-il avant de craquer ? Le bouclier que je m’étais forgé, qui jusque-là m’avait permis de ne jamais pleurer, est en train de s’effriter » (p. 142)